On parle tout le temps d’innovation produit mais est-ce vraiment la solution quand on veut monter son entreprise?
A moins de disposer de capitaux très importants, l’innovation peut être dangereuse pour une entreprise en démarrage.
Essayons d’analyser pourquoi.
L’innovation est ancrée dans les moeurs français. Un entrepreneur français a du mal à imaginer qu’il peut vendre et gagner de l’argent sans faire des produits innovants. Nous avons beaucoup de mal à nous détacher de ce côté naturel chez nous: ne pas faire comme le voisin.
A l’inverse, les américains ont un système de pensée bien différent, et qui parfois nous fait horreur. Ils se demandent simplement: Est-ce qu’il y a un marché pour tel produit? Est-ce que le prix de marché est rémunérateur? Quelle approche marketing je dois avoir pour capturer une part de ce marché? Et s’ils peuvent gagner de l’argent, ils se lancent.
Cette approche est beaucoup moins digne d’admiration, mais elle rapporte plus, et plus vite.
Voici comment se déroule un démarrage du côté français:
L’entrepreneur français va commencer par passer de longs mois à faire une étude de marché. Il y est fortement encouragé par les institutionnels (chambres de commerce et consultants d’entreprise). L’étude de marché est longue, complexe et couteuse. Elle aborde rarement le plan marketing.
L’étude de marché faite, on fabrique le produit puis on le lance.
S’agissant d’un produit innovant, le marché est plus ou moins bien connu. Et comme on n’a pas fait de plan marketing soigné, on a omis de déterminer comment on va convaincre les clients d’acheter.
L’entreprise est alors amenée à imaginer et mettre en place les moyens marketing pour faire connaitre son produit et convaincre ses clients d’acheter.
Elle le fait au moment où elle est le plus vulnérable: elle n’a aucun chiffre d’affaire et elle a déjà mangé une bonne partie de ses ressources.
Dès lors, c’est l’engrenage. Évidemment, on a sous estimé la capacité de réponse des clients. D’autant que les clients ont très rarement une attitude rationnelle. On pensait que tel argument allait être déterminant pour nous démarquer de la concurrence, mais il n’en est rien. Et la faillite guette, si on met trop longtemps à trouver comment vendre.
Imaginez ce qui se passe si vous optez pour l’approche me-too.
Vous avez opté pour un produit standard, banal peut-être. Vous savez qu’il y a un marché et vous avez fait un plan marketing soigné.
Vous avez une idée claire sur ce que vous devez faire pour toucher vos clients. Ce peut être de la publicité dans les journaux, du porte à porte, du phoning, un site internet…
Vous mettez en oeuvre votre plan marketing, et ô miracle! vous vendez vos produits au prix prévu et dans les délais prévus. Votre entreprise est un succès.
A ce stade, vous êtes prêt pour l’innovation incrémentale. De quoi s’agit-il ?
L’innovation incrémentale consiste à faire de petites innovations sur un produit qui existe déjà. Cette innovation est en général peu coûteuse et elle améliore le produit d’une façon spécifique qui vous permet de vous démarquer légèrement de la concurrence.
Cela vous permet de vendre plus ou plus facilement et de dégager de nouvelles ressources pour innover plus. Et chaque année, vous recommencez le processus.
Le risque est minimum parce que vous êtes dans un terrain parfaitement connu (vos clients, votre équipe, votre outil de production, votre système de vente…)
Le meilleur exemple de mise en place d’innovation incrémentale au cours des 50 dernières années est… Microsoft.
On leur reproche beaucoup de ne pas innover. C’est vrai qu’ils n’ont fait aucune innovation de rupture, mais chaque année, ils incorporent de petites améliorations dans leurs produits. Souvenez vous du temps du DOS et comparez avec les produits actuels.
Microsoft s’est souvent inspiré des bonnes idées des autres. Certes, ils ont essuyé quelques procès, mais cela leur a permis de résister et de garder une position de leader depuis 30 ans. Ce n’est peut-être pas glorieux, mais ça marche.
L’innovation est donc à prendre avec des pincettes: innovation totale quand on démarre: non, innovation incrémentale plus tard, une fois que l’on est connu: oui